Chapitre 6 :
Vagues de réminiscences, ombres de souvenirs distants, l’esprit
tourmenté d’un être déchiré semblait se livrer à une étrange mascarade…
Atlantis, la forteresse de Poséidon, était le nom que l’on donnait
habituellement à cette véritable ville flottante qui trônait en plein cœur du
grand Océanos. Au vu des impressionnantes défenses et des murailles
gigantesques, l’on sentait bien qu’un assaut, quel qu’il soit, serait
comparable à remplir le cratère des Danaïdes. L’édifice était divisé en sept tours
de taille moyenne ainsi qu’une immense tour centrale d’où sortait une énergie,
un cosmos d’une ampleur démesurée et d’une grande agressivité. Chacune des
tours était gravée de nombreuses inscriptions incompréhensibles pour le
profane. Leur utilité était inconnue des soldats eux-mêmes. La légère lueur
bleutée qui s’en dégageait laissait pourtant croire à de quelconques propriétés
magiques.
De nombreux gardes faisaient la ronde sur les remparts, accompagnés
d’êtres portant des écailles argentées à l’éclat lunaire. Ces hommes formaient
un stade intermédiaire entre les terribles généraux et les simples soldats.
Bien que leurs noms, tout comme leurs puissances, fussent très variés, l’on
avait l’habitude de les nommer lieutenants. L’un d’entre eux, le jeune Actéon,
inspectait la petite unité qui lui était affiliée. En effet chaque lieutenant
de l’Empereur avait à son service une unité de soldats, qui étaient souvent une
force de diversion dans les grands conflits. Les généraux, quant à eux,
commandaient à un groupe de trois lieutenants. Ces derniers étaient également
chargés de surveiller les tours d’Atlantis. Or Actéon était sous les ordres du
redoutable Chrysaor, qui n’appréciait guère les erreurs. Ainsi devait-il être
très vigilant.
« Hâtez-vous bande de fainéants ! Une ronde aussi lente est
inutile ! »
Joignant les gestes aux paroles, il brusquait ses hommes qui lui
obéissaient, bon gré mal gré. En effet le lieutenant du requin blanc était
d’une grande stature et d’une voix imposante. Alors qu’il plongeait son regard
dans l’océan azuré, un bruit sec détourna son attention. Les vagues se brisant
sur les fortifications, et les embruns salés heurtaient le visage des gardes
postés aux niveaux inférieurs. Or celle qui venait de rejoindre son destin
avait été gigantesque et avait emporté quelques mariners dans les eaux
tourmentées du grand large. N’ayant aucune envie de subir une telle
humiliation, Actéon se décida à rejoindre les hauteurs de la forteresse, attiré
par la vue que l’on disait magnifique. Il gravit les escaliers finement
sculptés de la tour Sud et y parvint.
Après quelques instants de silence,
le jeune homme contempla l’armée de Poséidon toute entière qui était
postée dans ce lieu mythique, prête à frapper le sanctuaire d’Athéna. Une
grande fierté grandissait dans la poitrine du requin alors qu’il imaginait déjà
le soir de la victoire. Mais un grondement d’une force divine manqua de le
faire chuter. En effet l’Empereur lui-même siégeait dans la salle centrale, en
compagnie de ses plus fidèles serviteurs. Les hurlement de colère qui
résonnaient dans les couloirs en disaient long sur l’opinion de ce dernier
quant aux dernières escarmouches. Le
son de sa voix atteignit même l’une des
salles de la tour Nord-est, où l’ambiance était bien morose…
Agénor, celui qui avait encore été le glorieux général du Kraken avant
la bataille, contemplait son écaille déchirée. Il tressaillit alors que la voix
de l’empereur retentit. Sa fureur était synonyme d’une punition future à
laquelle le mariner préférait ne pas penser. Elle n’avait rien plus rien de la
brillance quasi-divine qui l’avait habitée à Pélagos, lors de l’intronisation
des guerriers de l’empereur des Mers. Même les prêtres, mages redoutés pour
leur grande puissance, y avaient assisté. Le jeune homme se vit à nouveau,
glorieux, faisant face à ses maîtres dans le grand temple. Un sourire bref se
dessina sur ses lèvres mais son visage marqué par les combats ne tarda pas à se
plonger à nouveau dans la tristesse.
S’il s’était douté de l’issue des premiers affrontements, peut-être
n’aurait-il pas été si enthousiaste à partir en guerre …
« Le combat n’est pas un but en soi, seule la victoire compte
Agénor. »
L’homme qui avait prononcé ces quelques mots portait une magnifique robe
dont la couleur rappelait les plus belles perles des marchés de la Cité. Son
visage froid et sévère était entouré d’un torrent de cheveux d’une blancheur
éclatante. Ses yeux d’un bleu azuré fixaient les fresques qui décoraient le
gymnase. Des hommes aux lances dorées y affrontaient neuf étranges démons qui
semblaient sortir des entrailles de Gaia elle-même. Le talent de l’artisan
paraissait donner mouvance et vie à cette scène.
« Tu te bats car cela t’amuse. C’est un défaut qui pourrait te
coûter très cher. »
Il marqua une pause puis se retourna vers son interlocuteur.
« Crois-tu que les héros de la guerre des ombres se battaient par
plaisir ? »
A ces mots Agénor marqua une hésitation, comme déstabilisé par les
paroles de son maître.
« Je … ne sais pas vraiment … »
L’homme se contenta de répondre d’un ton neutre.
« Regarde bien ces hommes. »
Il observa attentivement les expressions des visages peints et y
discerna une ferme résolution mais
aucun plaisir. L’expression fermée et dure ne laissait nul doute. L’armée de guerriers aux casques ailés
laissait même paraître une certaine tristesse.
Agénor devait se rendre à l’évidence, le combat ne devait pas être
recherché pour lui-même… Mais pourtant il lui était si agréable qu’il ne
s’imaginait pas s’en passer.
« Ne t’en fais pas, tu auras l’occasion de te battre. »
L’instructeur semblait rêveur.
« Je pressens de grands
changements dans l’équilibre de ce monde. »
Son expression se fit à nouveau froide alors qu’il toisait son jeune
apprenti.
« Mais ne laisse jamais l’amusement te dicter ta conduite, la
victoire doit être ton seul objectif. »
Le regard d’Agénor se promenait encore sur la fresque alors que son
maître parlait. Au centre des démons, un personnage attira son attention. Il
portait une armure resplendissante et une gigantesque épée. Le large sourire
qu’il arborait, alors qu’il pourfendait celui qui semblait être le chef de ces
mêmes démons, contrastait très nettement avec les traits des autres
personnages. Le sang de l’être démoniaque, un ichor noirâtre, s’était répandu
sur sa lame et son corps. Surpris,
Agénor se tourna vers l’instructeur.
« Maître Kiriel, qui est cet homme ? »
La réponse se perdit dans les confins de son esprit …
Voile sombre … Un autre temps …
Le gymnase à nouveau, mais différent cette fois. Le temps y avait fait
son œuvre, altérant lentement et subtilement le glorieux marbre. Les fresques
avaient quant à elles échappé à la funeste serpe de Chronos, conservant tout
leur éclat. Les personnes présentes également étaient différentes. Le maître avait disparu et Agénor semblait
avoir grandi. Son visage s’est fait plus anguleux alors que sa musculature
s’était nettement développée. Une fine aura bleutée l’entourait, déformant la
vision et rendant la silhouette plus floue. Des cristaux de glace se concentraient dans sa main alors qu’une
concentration extrême se lisait sur ses traits.
« Daphnis prépare toi… Tu vas découvrir mon aurore
boréale ! »
Une marque d’amusent se lisait sur les lèvres finement maquillées de son
interlocuteur.
« L’attaque de Kiriel … Tu sais très bien que tu ne la maîtrises
pas suffisamment. Même Aglaope pourrait l’éviter. »
La remarque ne manqua pas d’agacer le fier Agénor.
« Ah oui ? Et bien nous allons voir Daphnis. Aglaope
viens ici ! »
De l’autre extrémité du gymnase, le jeune éphèbe entendit distinctement
la forte voix de son compagnon d’entraînement. Il s’approcha, interrompant ses
exercices.
« Qui se passe-t-il ? »
Agénor désigna Daphnis du doigt. Ce dernier ne réagit même pas.
« Figure toi que ce prêtre pense que tu es capable d’éviter mon attaque.
Afin de lui prouver l’absurdité de ses dires j’ai décidé d’accepter le
défi. »
Aglaope, surpris, était plongé dans un profond mutisme.
« Et bien … Qu’attends-tu ? En garde ! »
L’air glacial emplissait la salle. Sa puissance grandissait à chaque instant
mais Daphnis ne semblait pas réagir au spectacle. Aglaope se mit lentement en
position, prêt à se défendre contre l’attaque de son compagnon.
« Prépare toi ... AURORA BOREALIS !"
La vague multicolore, propulsée à une très grande vitesse, allait engloutir
Aglaope et le terrasser. Agénor sourit de sa victoire déjà acquise. Soudain une
voix retenti alors que la silhouette de son adversaire semblait changer,
devenant plus imposante.
« Tu as déjà utilisé cette technique contre moi. Encaisse ton
propre coup ! »
Aglaope leva la main et encaissa la vague de glace avant de la renvoyer
dans le même mouvement. Agénor, médusé, ne put esquisser le moindre geste et
s’écrasa dans l’eau … L’eau ? Mais que …
Le choc de l’éveil fut brutal et le général du Kraken manqua de chuter.
Alors qu’il se relevait péniblement un homme portant une écaille légèrement
endommagée s’approcha. Le silence suivait chacun de ses pas. Troublé, Agénor
l’observa longuement alors qu’il se dirigeait vers les étages supérieurs de la
forteresse. L’état du fier Rhodé faisait peine à voir et ne manqua pas de lui
rappeler, si besoin était, leur cuisant échec. Cet homme, Eaque, les avait
battus avec une facilité déconcertante… La cruelle morsure de la défaite avait
profondément entaillé son âme et le jeune atlante laissait le désespoir le
gagner.
« Rhodé … Tu as été vaincu d’un seul coup … Alors que je fus on ne
peut plus ridicule face à Adonis … Comment pourrons-nous remporter cette
guerre ? »
Se parlant à lui-même, il n’attendait pas de réponse. Pourtant une voix
calme mais hautaine résonna dans l’allée de marbre bleuté.
« Tu es ridicule… Je ne savais pas que mon père avait choisi
d’aussi faibles soldats. »
Agénor porta le regard vers le nouvel arrivant. Son armure
resplendissante ainsi que le redoutable glaive qu’il tenait dans sa main droite
ne laissaient aucun doute quant à son identité.
« Chrysaor … je sais bien que tu as vaincu ton adversaire, mais
… »
Lui lançant un regard chargé de reproches, son compagnon le croisa sans
mot dire. Sa colère semblait s’étendre dans l’air alentour, le chargeant d’une
énergie négative. Alors qu’il allait disparaître dans l’angle des murailles, il
s’arrêta.
« Je pensais que ta volonté était sans bornes et que ton courage
n’avait pas de limites. Ces qualités auraient du te permettre de combler le
gouffre de puissance qui te sépare des chevaliers d’or. »
La quiétude revenait lentement alors qu’il reprit, indifférent à la mine
désemparée d’Agénor.
« Et maintenant il est enfin revenu … Cette fois-ci la victoire
nous est acquise. »
Un rire léger et pourtant fort menaçant accompagna son départ vers la
tour Est. Le général du Kraken resta seul, sans vraiment comprendre à quoi son
compagnon avait fait allusion.
« Maître Kiriel … Je ne suis pas digne de vous… Mais peut-être
aurai-je la chance de me racheter et de vaincre ce maudit Adonis … »
Le poing serré il contemplait la mer entre deux colonnes. Dans les
embruns le visage du chevalier des poissons semblait encore le narguer. N’y
tenant plus, c’est d’un geste rapide qu’il frappa le mur derrière lui pour n’y
laisser qu’une légère entaille.
« Au moins la pierre d’Atlantis est toujours aussi solide …
Espérons qu’elle le soit assez pour retenir ces chevaliers d’or … »
Quelques gouttes de sang s’écoulèrent sur le sol sacré. Elles seraient
sans doute la source d’un grand fleuve.
Le royaume des morts, lieu de damnation éternelle.
Rhadamanthe observait les nouveaux surplis, placés devant Giuddecca. Ces
derniers luisaient d’une clarté lunaire dans l’obscurité brisée uniquement par
quelques timides torches. Les ténèbres ne gênaient pas le juge des enfers, bien
au contraire. Ils lui apportaient un sentiment de paix et de sérénité dont la
vie tourmentée des hommes semblait privée. D’ailleurs au sujet d’hommes, ou
plutôt de ce qu’il en restait, le vieillard
qui s’affairait dans la pièce voisine n’était qu’au début de ses
tourments. Trahir un dieu était un crime impardonnable et sa majesté Hadès
était encore bien clémente envers ce scélérat.
Le silence, si cher à Minos, n’était brisé que par le bruit de ses
outils frappant le métal. Minos … Le fait que cet homme si étrange et
ambivalent soit devenu juge des enfers étonnait quelque peu son frère. Il avait
certes remarquablement administré légiféré et administré l’empire crétois, un remarquable
archégête tel que ceux que les mortels admiraient tant. Mais son comportement
envers Athènes avait été pour le moins cruel et le Minotaure n’était pas une
œuvre très glorieuse de sa part… Pas plus qu’emprisonner Dédale après la
construction du Labyrinthe.
Rhadamanthe lui-même n’avait pas
manqué des qualités de son aîné dans sa vie, surtout quand il du créer une
société pour les révoltés d’une île lointaine … Sa force lui avait également
beaucoup servi dans cette entreprise. En effet lui comme son frère étaient de
sang divin et une puissance colossale coulait dans leurs veines. Leur père Zeus
avait toujours assisté Minos qu’il semblait préférer durant leur vie, mais
Rhadamanthe n’en avait cure. Malgré le complot que son frère avait fomenté pour
s’emparer du trône de Knossos, il ne lui en tenait pas rigueur. Après tout il
était sans doute plus apte que lui à diriger un état si puissant.
Depuis son plus jeune âge Rhadamanthe avait toujours apprécié les
activités physiques, de telle sorte qu’il ne pouvait pas imaginer une existence
sans elles. Et pourtant les enfers n’étaient pas dotés de palestre ou autre
gymnase. Fort heureusement son corps était resté dans l’état qui était le sien
à sa mort .
Sa mort … Une gigantesque vague, un tourbillon… Puis plus rien.
« Seigneur Rhadamanthe… Nous avons d’autres retrouvés d’autres âmes
de spectres au royaume des morts … »
L’homme qui venait de parler portait une robe grise et avait de longs
cheveux lisses qui coulaient sur ses épaules. Il dégageait une grande sérénité.
« Ah Rune … Et bien qui sont-ils ? »
« Et bien .. nous avons un certain Ixion … un être d’une grande
force avant sa mort. Valentine, votre ancien serviteur, a également répondu à
l’appel de sa Majesté. »
A ces mots, Rhadamanthe le fixa. La présence de Valentine dans l’armée
le réjouissait certes, mais avait-il bien mesuré les conséquences d’un tel
choix … Devenir un guerrier d’Hadès pour l’éternité était peut-être préférable
à l’enfer lui-même, mais rien n’était moins sûr. Le juge des enfers, qui s’accommodait
fort bien de son sort, ne voulait pas imposer des milliers de batailles jusqu’à
la fin des temps à ses anciens compagnons.
« Rune ne relâche pas
tes efforts. Nous devons être prêts le plus rapidement possible. Sa Majesté
ressent de grands troubles à la surface… »
Il semblait désigner la
grande salle de Giudecca, comme pour appuyer ses propos.
« Ne la déçois
pas. »
« Vous pouvez compter
sur moi seigneur Rhadamanthe, je trouverai les âmes élues désignées par sa
majesté. »
Rune s’inclina brièvement et
retourna dans les prisons, à la recherche d’êtres adéquats. Le juge des enfers
retourna au tribunal.
Eaque et Etéocle avançaient à travers les maisons du zodiaque, se
dirigeant vers la maison du verseau. Les travaux avançaient assez rapidement, ce
qui ne manquait pas de leur plaire.
« Bientôt cet endroit sera imprenable Eaque, nos ennemis ne
pourront rien contre nous. »
Le chevalier du lion ne faisait rien pour dissimuler la joie qui
l’envahissait à cette perspective.
« Certes mais nous devons nous hâter … Je sens que Deucalion
s’énerve … »
Le cosmos du chevalier du verseau grandissait, alors qu’un air froid
d’échappait de son temple. Les deux hommes se mirent à courir.
Pendant ce temps dans le temple, Amphyon ne pouvait que constater la
folie de Deucalion. Ce regard si agressif ne pouvait être celui de son calme
compagnon et le chevalier du sagittaire était déterminé à comprendre les
raisons de ce changement. Pourtant l’heure n’était pas aux réflexions. En effet
Deucalion s’apprêtait à déclencher un coup qui serait sans doute fatal.
« Tu ne me laisses pas le choix Deucalion … »
Le chevalier du sagittaire concentra à son tour son cosmos. La rencontre
des deux auras provoqua de multiples explosions. Le chevalier du verseau partit
d’un rire dément.
« AHAHA ! Tu ne crois tout de même pas pouvoir me voler la
lettre ? Je vais t’écraser… »
Levant les bras il déploya toute son énergie. Amphyon fit de même alors
qu’il avait légèrement reculé son poing. Un globe doré s’y formait.
« Meurs chien ! Aurora Ex .. »
« Arrêtez ! »
Une vive lumière aveugla toute l’assistance alors que du métal heurtait
le sol et que la pierre semblait se briser. Amphyon écarquilla les yeux et
distingua vaguement une silhouette devant lui.
« Etéocle laisse le. »
Reconnaissant la voix d’Eaque, le chevalier du sagittaire fut soulagé.
Etéocle, quant à lui, relâcha Deucalion qu’il était parvenu à ceinturer. Ce
dernier s’éloigna rapidement et retournera vers sa lettre.
« Voleurs… » dit-il d’une voix sifflante.
« Ecoute moi Deucalion… Nous allons t’accompagner et tu pourras
donner cette lettre à Athéna … »
Les paroles du chevalier du cancer surprirent ses deux compagnons. Le
fier Etéocle fut le premier à réagir.
« Tu es bien sûr de ce que tu dis Eaque ? N’est-ce pas
dangereux ? »
Amphyon renchérit à son tour.
« De plus nous ne savons même pas ce que contient cette lettre
… »
La voix pleine d’assurance d’Eaque coupa court à toute objection.
« Ecoutez je crois avoir compris la technique utilisée sur notre
ami. Elle est très pernicieuse et si je ne me trompe pas il n’y a qu’un seul
moyen de retrouver le vrai Deucalion … »
Le roi d’Egine n’attendit pas la réponse de ses compagnons pour se
diriger vers la demeure d’Adonis, enjoignant les autres à le suivre. La
question de l’identité du possesseur d’une telle technique ne semblait pas
avoir frappé Amphyon et Etéocle, mais Eaque connaissait trop bien ce type
d’attaques pour ne pas se la poser. Il fallait une maîtrise redoutable des arts
de l’esprit pour arriver à un tel résultat. Cette technique semblait même
surpasser sa propre Gallactica Illusion, pourtant redoutable. C’est l’esprit
plein de questions qu’il parvint à la maison des poissons…
La mare de sang, l’endroit où les êtres violents souffraient une
éternité de douleur intense afin d’expier leurs crimes. Les corps déchirés
voyaient leur chair fondre avec que les os se dévoilaient dans les vapeurs
suffocantes. Leur peine devait être à la mesure de leur vie. Hadès n’aimait pas
la violence aveugle et la cruauté gratuite, malgré ses airs inhumains.
Rune ne pouvait s’empêcher de
penser que cet endroit n’était pas d’un grand intérêt. En effet le seigneur des
ténèbres choisissait rarement des êtres brutaux et sanguinaires pour son armée.
En réfléchissant à la liste donnée par l’empereur il ne put que constater que
certains des élus n’étaient pas encore aux enfers… Ce problème n’était pourtant
pas d’actualité car sa Majesté avait sans doute tout prévu. Pour l’heure il
devait dénicher un dénommé Myû et le trouver ne serait pas chose aisée. En effet
les âmes perdaient toute individualité dans le royaume des morts, et sans
l’aide de sa Majesté il était impossible de reconnaître les élus. En présence
de l’un d’entre eux, Rune sentait simplement sa vraie nature, sans vraiment
pouvoir expliquer comment. L’inutilité de la vue rendait d’autant plus sa tâche
difficile. Heureusement Phlégyas cherchait avec lui. En ce moment il devait
d’ailleurs fouiller les environs de l’Achéron …
A ce propos Rune se souvint que le nocher avait été récemment désigné
pour rejoindre l’armée. Cette nouvelle n’était guère surprenante, car en plus
d’être un bon combattant, Charon était entièrement fidèle à la cause d’Hadès.
Avec lui les guerriers de ce dernier atteignaient la trentaine, ce qui était
relativement satisfait pour des recherches aussi courtes.
Rune reprit sa marche aux alentours de la mare, ressentant que l’âme
s’approchait…